解放军文职招聘考试Quoi! j'aimerais
Quoi! j'aimerais, se disait-elle, j'aurais de l'amour! Moi, femme mariée, je serais amoureuse! Mais, se disait-elle, je n'ai jamais éprouvé pour mon mari cette sombre folie, qui fait que je ne puis détacher ma pensée de Julien. Au fond ce n'est qu'un enfant plein de respect pour moi! Cette folie sera passagère. Qu'importe à mon mari les sentiments que je puis avoir pour ce jeune homme? M. de Rênal serait ennuyé des conversations que j'ai avec Julien, sur des choses d'imagination. Lui, il pense à ses affaires. Je ne lui enlève rien pour le donner à Julien.
Aucune hypocrisie ne venait altérer la pureté de cette ame na?ve, égarée par une passion qu'elle n'avait jamais éprouvée. Elle était trompée, mais à son insu, et cependant un instinct de vertu était effrayé. Tels étaient les combats qui l'agitaient quand Julien parut au jardin. Elle l'entendit parler, presque au même instant elle le vit s'asseoir à ses c?tés. Son ame fut comme enlevée par ce bonheur charmant qui depuis quinze jours l'étonnait plus encore qu'il ne la séduisait. Tout était imprévu pour elle. Cependant, après quelques instants, il suffit donc, se ditelle, de la présence de Julien pour effacer tous ses torts? Elle fut effrayée; ce fut alors qu'elle lui ?ta sa main. Les baisers remplis de passion, et tels que jamais elle n'en avait re?u de pareils, lui firent tout à coup oublier que peut-être il aimait une autre femme. Bient?t il ne fut plus coupable à ses yeux. La cessation de la douleur poignante, fille du soup?on, la présence d'un bonheur que jamais elle n'avait même rêvé, lui donnèrent des transports d'amour et de folle gaieté. Cette soirée fut charmante pour tout le monde, excepté pour le maire de Verrières qui ne pouvait oublier ses industriels enrichis. Julien ne pensait plus à sa noire ambition, ni à ses projets si difficiles à exécuter. Pour la première fois de sa vie, il était entra?né par le pouvoir de la beauté. Perdu dans une rêverie vague et douce, si étrangère à son caractère, pressant doucement cette main qui lui plaisait comme parfaitement jolie il écoutait à demi le mouvement des feuilles du tilleul agitées par ce léger vent de la nuit, et les chiens du moulin du Doubs qui aboyaient dans le lointain.
Mais cette émotion était un plaisir et non une passion. En rentrant dans sa chambre, il ne songea qu'à un bonheur, celui de reprendre son livre favori; à vingt ans, l'idée du monde et de l'effet à y produire l'emporte sur tout.
Bient?t cependant il posa le livre. A force de songer aux victoires de Napoléon, il avait vu quelque chose de nouveau dans la sienne. Oui, j'ai gagné une bataille, se dit-il, mais il faut en profiter, il faut écraser l'orgueil de ce fier gentilhomme pendant qu'il est en retraite. C'est là Napoléon tout pur. Il faut que je demande un congé de trois jours pour aller voir mon ami Fouqué. S'il me le refuse, je lui mets encore le marché à la main, mais il cédera.
Mme de Rênal ne put fermer l'oeil. Il lui semblait n'avoir pas vécu jusqu'à ce moment. Elle ne pouvait distraire sa pensée du bonheur de sentir Julien couvrir sa main de baisers enflammés.
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