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解放军文职招聘考试l s'approcha

来源: 2017-10-03 09:35

 Il s'approcha vivement du comptoir et de la jolie fille, comme il e?t marché à l'ennemi. Dans ce grand mouvement, son paquet tomba.

Quelle pitié notre provincial ne va-t-il pas inspirer aux jeunes lycéens de Paris qui, à quinze ans, savent déjà entrer dans un café d'un air si distingué? Mais ces enfants, si bien stylés à quinze ans, à dix-huit tournent au commun. La timidité passionnée que l'on rencontre en province se surmonte quelquefois et alors elle enseigne à vouloir. En s'approchant de cette jeune fille si belle, qui daignait lui adresser la parole, il faut que je lui dise la vérité, pensa Julien, qui devenait courageux à force de timidité vaincue.

-      Madame, je viens pour la première fois de ma vie àBesan?on; je voudrais bien avoir, en payant, un pain et une tasse de café.

La demoiselle sourit un peu et puis rougit; elle craignait, pour ce joli jeune homme, l'attention ironique et les plaisanteries des joueurs de billard. Il serait effrayé et ne repara?trait plus.

-      Placez-vous ici, près de moi, dit-elle en lui montrant unetable de marbre, presque tout à fait cachée par l'énorme comptoir d'acajou qui s'avance dans la salle.

La demoiselle se pencha en dehors du comptoir, ce qui lui donna l'occasion de déployer une taille superbe. Julien la remarqua; toutes ses idées changèrent. La belle demoiselle venait de placer devant lui une tasse, du sucre et un petit pain. Elle hésitait à appeler un gar?on pour avoir du café, comprenant bien qu'à l'arrivée de ce gar?on, son tête-àtête avec Julien allait finir.

Julien, pensif, comparait cette beauté blonde et gaie à certains souvenirs qui l'agitaient souvent. L'idée de la passion dont il avait été l'objet lui ?ta presque toute sa timidité. La belle demoiselle n'avait qu'un instant; elle lut dans les regards de Julien.

-      Cette fumée de pipe vous fait tousser, venez déjeunerdemain avant huit heures du matin; alors, je suis presque seule.

-      Quel est votre nom? dit Julien, avec le sourire caressantde la timidité heureuse.

-      Amanda Binet.

-      Permettez-vous que je vous envoie, dans une heure, unpetit paquet gros comme celui-ci? La belle Amanda réfléchit un peu.

-      Je suis surveillée: ce que vous me demandez peut mecompromettre; cependant, je m'en vais écrire mon adresse sur une carte, que vous placerez sur votre paquet.

Envoyez-le-moi hardiment.

-      Je m'appelle Julien Sorel, dit le jeune homme; je n'ai niparents, ni connaissance à Besan?on.

-      Ah! je comprends, dit-elle avec joie, vous venez pourl'Ecole de droit?

-      Hélas! non, répondit Julien; on m'envoie au séminaire.Le découragement le plus complet éteignit les traits d'Amanda; elle appela un gar?on: elle avait du courage maintenant. Le gar?on versa du café à Julien, sans le regarder.

Amanda recevait de l'argent au comptoir; Julien était fier d'avoir osé parler: on se disputa à l'un des billards. Les cris et les démentis des joueurs, retentissant dans cette salle immense, faisaient un tapage qui étonnait Julien. Amanda était rêveuse et baissait les yeux.

-      Si vous voulez, mademoiselle, lui dit-il tout à coup avecassurance, je dirai que je suis votre cousin.

Ce petit air d'autorité plut à Amanda. Ce n'est pas un jeune homme de rien, pensa-t-elle. Elle lui dit fort vite, sans le regarder, car son oeil était occupé à voir si quelqu'un s'approchait du comptoir:

-      Moi je suis de Genlis, près de Dijon; dites que vous êtesaussi de Genlis, et cousin de ma mère.

-      Je n'y manquerai pas.

-      Tous les jeudis, à cinq heures, en été, MM. lesséminaristes passent ici devant le café.

-      Si vous pensez à moi, quand je passerai, ayez unbouquet de violettes à la main.

Amanda le regarda d'un air étonné; ce regard changea le courage de Julien en témérité; cependant il rougit beaucoup en lui disant:

-      Je sens que je vous aime de l'amour le plus violent.

-      Parlez donc plus bas, lui dit-elle d'un air effrayé.

Julien songeait à se rappeler les phrases d'un volume dépareillé de La Nouvelle Hélo?se, qu'il avait trouvé à Vergy. Sa mémoire le servit bien; depuis dix minutes, il récitait La Nouvelle Hélo?se à Mlle Amanda, ravie, il était heureux de sa bravoure, quand tout à coup la belle FrancComtoise prit un air glacial. Un de ses amants paraissait à la porte du café.

Il s'approcha du comptoir, en sifflant et marchant des épaules; il regarda Julien. A l'instant, l'imagination de celui-ci, toujours dans les extrêmes, ne fut remplie que d'idées de duel. Il palit beaucoup, éloigna sa tasse, prit une mine assurée, et regarda son rival fort attentivement. Comme ce rival baissait la tête en se versant familièrement un verre d'eau-de-vie sur le comptoir, d'un regard Amanda ordonna à Julien de baisser les yeux. Il obéit, et, pendant deux minutes, se tint immobile à sa place, pale, résolu et ne songeant qu'à ce qui allait arriver; il était vraiment bien en cet instant. Le rival avait été étonné des yeux de Julien; son verre d'eau-de-vie avalé d'un trait, il dit un mot à Amanda, pla?a ses deux mains dans les poches latérales de sa grosse redingote, et s'approcha d'un billard en soufflant et regardant Julien. Celui-ci se leva transporté de colère; mais il ne savait comment s'y prendre pour être insolent. Il posa son petit paquet, et, de l'air le plus dandinant qu'il put, marcha vers le billard.

En vain la prudence lui disait: Mais avec un duel dès l'arrivée à Besan?on, la carrière ecclésiastique est perdue. - Qu'importe, il ne sera pas dit que je manque un insolent. Amanda vit son courage; il faisait un joli contraste avec la na?veté de ses manières; en un instant, elle le préféra au grand jeune homme en redingote. Elle se leva, et, tout en ayant l'air de suivre de l'oeil quelqu'un qui passait dans la rue, elle vint se placer rapidement entre lui et le billard: - Gardez-vous de regarder de travers ce monsieur, c'est mon beau-frère.

-      Que m'importe, il m'a regardé.

-      Voulez-vous me rendre malheureuse? Sans doute, il vousa regardé, peut-être même il va venir vous parler. Je lui ai dit que vous êtes un parent de ma mère, et que vous arrivez de Genlis. Lui est Franc-Comtois et n'a jamais dépassé D?le, sur la route de la Bourgogne; ainsi dites ce que vous voudrez, ne craignez rien. 

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