电话:0731-83595998
导航

《基督山伯爵》中法对照版17

来源: 2017-09-02 09:14

 Chapitre VII

L'interrogatoire

A peine de Villefort fut-il hors de la salle à manger qu'il quitta son masque joyeux pour prendre l'air grave d'un homme appelé à cette suprême fonction de prononcer sur la vie de son semblable. Or, malgré la mobilité de sa physionomie, mobilité que le substitut avait, comme doit faire un habile acteur, plus d'une fois étudiée devant sa glace, ce fut cette fois un travail pour lui que de froncer son sourcil et d'assombrir ses traits. En effet, à part le souvenir de cette ligne politique suivie par son père, et qui pouvait, s'il ne s'en éloignait complètement, faire dévier son avenir, Gérard de Villefort était en ce moment aussi heureux qu'il est donné à un homme de le devenir ; déjà riche par lui-même, il occupait à vingt-sept ans une place élevée dans la magistrature, il épousait une jeune et belle personne qu'il aimait, non pas passionnément, mais avec raison, comme un substitut du procureur du roi peut aimer, et outre sa beauté, qui était remarquable, Mlle de Saint-Méran, sa fiancée, appartenait à une des familles les mieux en cour de l'époque ; et outre l'influence de son père et de sa mère, qui, n'ayant point d'autre enfant, pouvaient la conserver tout entière à leur gendre, elle apportait encore à son mari une dot de cinquante mille écus, qui, grace aux espérances, ce mot atroce inventé par les entremetteurs de mariage, pouvait s'augmenter un jour d'un héritage d'un demi-million.

Tous ces éléments réunis composaient donc pour Villefort un total de félicité éblouissant, à ce point qu'il lui semblait voir des taches au soleil, quand il avait longtemps regardé sa vie intérieure avec la vue de l'ame.

A la porte, il trouva le commissaire de police qui l'attendait. La vue de l'homme noir le fit aussit?t retomber des hauteurs du troisième ciel sur la terre matérielle où nous marchons ; il composa son visage, comme nous l'avons dit, et s'approchant de l'officier de justice :

? Me voici, monsieur, lui dit-il ; j'ai lu la lettre, et vous avez bien fait d'arrêter cet homme ; maintenant donnez-moi sur lui et sur la conspiration tous les détails que vous avez recueillis.

- De la conspiration, monsieur, nous ne savons rien encore ; tous les papiers saisis sur lui ont été enfermés en une seule liasse, et déposés cachetés sur votre bureau. Quant au prévenu, vous l'avez vu par la lettre même qui le dénonce, c'est un nommé Edmond Dantès, second à bord du trois-mats le Pharaon, faisant le commerce de coton avec Alexandrie et Smyrne, et appartenant à la maison Morrel et fils, de Marseille.

- Avant de servir dans la marine marchande, avait-il servi dans la marine militaire ?

- Oh ! non, monsieur ; c'est un tout jeune homme.

- Quel age ?

- Dix-neuf ou vingt ans au plus. ?

En ce moment, et comme Villefort, en suivant la Grande-Rue, était arrivé au coin de la rue des Conseils, un homme qui semblait l'attendre au passage l'aborda : c'était M. Morrel.

? Ah ! monsieur de Villefort ! s'écria le brave homme en apercevant le substitut, je suis bien heureux de vous rencontrer. Imaginez-vous qu'on vient de commettre la méprise la plus étrange, la plus inou?e : on vient d'arrêter le second de mon batiment, Edmond Dantès.

- Je le sais, monsieur, dit Villefort, et je viens pour l'interroger.

- Oh ! monsieur, continua M. Morrel, emporté par son amitié pour le jeune homme, vous ne connaissez pas celui qu'on accuse, et je le connais, moi : imaginez vous l'homme le plus doux, l'homme le plus probe, et j'oserai presque dire l'homme qui sait le mieux son état de toute la marine marchande. O monsieur de Villefort ! je vous le recommande bien sincèrement et de tout mon coeur. ?

Villefort, comme on a pu le voir, appartenait au parti noble de la ville, et Morrel au parti plébéien ; le premier était royaliste ultra, le second était soup?onné de sourd bonapartisme. Villefort regarda dédaigneusement Morrel, et lui répondit avec froideur :

? Vous savez, monsieur, qu'on peut être doux dans la vie privée, probe dans ses relations commerciales, savant dans son état, et n'en être pas moins un grand coupable, politiquement parlant ; vous le savez, n'est ce pas, monsieur ? ?

Et le magistrat appuya sur ces derniers mots, comme s'il en voulait faire l'application à l'armateur lui-même ; tandis que son regard scrutateur semblait vouloir pénétrer jusqu'au fond du coeur de cet homme assez hardi d'intercéder pour un autre, quand il devait savoir que lui-même avait besoin d'indulgence.

Morrel rougit, car il ne se sentait pas la conscience bien nette à l'endroit des opinions politiques ; et d'ailleurs la confidence que lui avait faite Dantès à l'endroit de son entrevue avec le grand maréchal et des quelques mots que lui avait adressés l'Empereur lui troublait quelque peu l'esprit. Il ajouta, toutefois, avec l'accent du plus profond intérêt :

? Je vous en supplie, monsieur de Villefort, soyez juste comme vous devez l'être, bon comme vous l'êtes toujours, et rendez-nous bien vite ce pauvre Dantès ! ?

Le rendez-nous sonna révolutionnairement à l'oreille du substitut du procureur du roi.

? Eh ! eh ! se dit-il tout bas, rendez-nous... ce Dantès serait-il affilié à quelque secte de carbonari, pour que son protecteur emploie ainsi, sans y songer, la formule collective ? on l'a arrêté dans un cabaret, m'a dit, je crois, le commissaire ; en nombreuse compagnie, a-t-il ajouté : ce sera quelque vente. ?

Puis tout haut :

? Monsieur, répondit-il, vous pouvez être parfaitement tranquille, et vous n'aurez pas fait un appel inutile à ma justice si le prévenu est innocent ; mais si, au contraire, il est coupable, nous vivons dans une époque difficile, monsieur, où l'impunité serait d'un fatal exemple : je serai donc forcé de faire mon devoir. ?

Et sur ce, comme il était arrivé à la porte de sa maison adossée au palais de justice, il entra majestueusement, après avoir salué avec une politesse de glace le malheureux armateur, qui resta comme pétrifié à la place où l'avait quitté Villefort.

L'antichambre était pleine de gendarmes et d'agents de police ; au milieu d'eux, gardé à vue, enveloppé de regards flamboyants de haine, se tenait debout, calme et immobile, le prisonnier.

Villefort traversa l'antichambre, jeta un regard oblique sur Dantès, et, après avoir pris une liasse que lui remit un agent, disparut en disant :

? Qu'on amène le prisonnier. ?

Si rapide qu'e?t été ce regard, il avait suffi à Villefort pour se faire une idée de l'homme qu'il allait avoir à interroger : il avait reconnu l'intelligence dans ce front large et ouvert, le courage dans cet oeil fixe et ce sourcil froncé, et la franchise dans ces lèvres épaisses et à demi ouvertes, qui laissaient voir une double rangée de dents blanches comme l'ivoire.

La première impression avait été favorable à Dantès ; mais Villefort avait entendu dire si souvent, comme un mot de profonde politique, qu'il fallait se défier de son premier mouvement, attendu que c'était le bon, qu'il appliqua la maxime à l'impression, sans tenir compte de la différence qu'il y a entre les deux mots.

Il étouffa donc les bons instincts qui voulaient envahir son coeur pour livrer de là assaut à son esprit, arrangea devant la glace sa figure des grands jours et s'assit, sombre et mena?ant, devant son bureau.

Un instant après lui, Dantès entra.

Le jeune homme était toujours pale, mais calme et souriant ; il salua son juge avec une politesse aisée, puis chercha des yeux un siège, comme s'il e?t été dans le salon des l'armateur Morrel.

Ce fut alors seulement qu'il rencontra ce regard terne de Villefort, ce regard particulier aux hommes de palais, qui ne veulent pas qu'on lise dans leur pensée, et qui font de leur oeil un verre dépoli. Ce regard lui apprit qu'il était devant la justice, figure aux sombres fa?ons.

? Qui êtes-vous et comment vous nommez-vous ? demanda Villefort en feuilletant ces notes que l'agent lui avait remises en entrant, et qui depuis une heure étaient déjà devenues volumineuses, tant la corruption des espionnages s'attache vite à ce corps malheureux qu'on nomme les prévenus.

- Je m'appelle Edmond Dantès, monsieur, répondit le jeune homme d'une voix calme et sonore ; je suis second à bord du navire le Pharaon, qui appartient à MM. Morrel et fils.

- Votre age ? continua Villefort.

- Dix-neuf ans, répondit Dantès.

- Que faisiez-vous au moment où vous avez été arrêté ?

- J'assistais au repas de mes propres fian?ailles, monsieur ?, dit Dantès d'une voix légèrement émue, tant le contraste était douloureux de ces moments de joie avec la lugubre cérémonie qui s'accomplissait, tant le visage sombre de M.de Villefort faisait briller de toute sa lumière la rayonnante figure de Mercédès.

? Vous assistiez au repas de vos fian?ailles ? dit le substitut en tressaillant malgré lui.

- Oui, monsieur, je suis sur le point d'épouser une femme que j'aime depuis trois ans. ?

Villefort, tout impassible qu'il était d'ordinaire, fut cependant frappé de co?ncidence, et cette voix émue de Dantès surpris au milieu de son bonheur alla éveiller une fibre sympathique au fond de son ame : lui aussi se mariait, lui aussi était heureux, et on venait troubler son bonheur pour qu'il contribuat à détruire la joie d'un homme qui, comme lui, touchait déjà au bonheur.

Ce rapprochement philosophique, pensa-t-il, fera grand effet à mon retour dans le salon de M. de Saint-Méran ; et il arrangea d'avance dans son esprit, et pendant que Dantès attendait de nouvelles questions, les mots antithétiques à l'aide desquels les orateurs construisent ces phrases ambitieuses d'applaudissements qui parfois font croire à une véritable éloquence.

Lorsque son petit speech intérieur fut arrangé, Villefort sourit à son effet, et revenant à Dantès :

? Continuez, monsieur, dit-il.

- Que voulez-vous que je continue ?

- D'éclairer la justice.

- Que la justice me dise sur quel point elle veut être éclairée, et je lui dirai tout ce que je sais ; seulement, ajouta-t- il à son tour avec un sourire, je la préviens que je ne sais pas grand-chose.

- Avez-vous servi sous l'usurpateur ?

- J'allais être incorporé dans la marine militaire lorsqu'il est tombé.

- On dit vos opinions politiques exagérées, dit Villefort, à qui l'on n'avait pas soufflé un mot de cela, mais qui n'était pas faché de poser la demande comme on pose une accusation.

- Mes opinions politiques, à moi, monsieur ? Hélas ! c'est presque honteux à dire, mais je n'ai jamais eu ce qu'on appelle une opinion : j'ai dix-neuf ans à peine, comme j'ai eu l'honneur de vous le dire ; je ne sais rien, je ne suis destiné à jouer aucun r?le ; le peu que je suis et que je serai, si l'on m'accorde la place que j'ambitionne, c'est à M. Morrel que le devrai. Aussi, toutes mes opinions, je ne dirai pas politiques, mais privées, se bornent-elles à ces trois sentiments : j'aime mon père, je respecte M. Morrel et j'adore Mercédès. Voilà, monsieur, tout ce que je puis dire à la justice ; vous voyez que c'est peu intéressant pour elle. ?

A mesure que Dantès parlait, Villefort regardait son visage à la fois si doux et si ouvert, et se sentait revenir à la mémoire les paroles de Renée, qui, sans le conna?tre, lui avait demandé son indulgence pour le prévenu. Avec l'habitude qu'avait déjà le substitut du crime et des criminels, il voyait, à chaque parole de Dantès, surgir la preuve de son innocence. En effet, ce jeune homme, on pourrait presque dire cet enfant, simple, naturel, éloquent de cette éloquence du coeur qu'on ne trouve jamais quand on la cherche, plein d'affection pour tous, parce qu'il était heureux, et que le bonheur rend bons les méchants eux-mêmes, versait jusque sur son juge la douce affabilité qui débordait de son coeur, Edmond n'avait dans le regard, dans la voix, dans le geste, tout rude et tout sévère qu'avait été Villefort envers lui, que caresses et bonté pour celui qui l'interrogeait.

? Pardieu, se dit Villefort, voici un charmant gar?on, et je n'aurai pas grand- peine, je l'espère, à me faire bien voir de Renée en accomplissant la première recommandation qu'elle m'a faite : cela me vaudra un bon serrement de main devant tout le monde et un charmant baiser dans un coin. ?

Et à cette douce espérance la figure de Villefort s'épanouit ; de sorte que, lorsqu'il reporta ses regards de sa pensée à Dantès, Dantès, qui avait suivi tous les mouvements de physionomie de son juge, souriait comme sa pensée.

- Monsieur, dit Villefort, vous connaissez-vous quelques ennemis ?

- Des ennemis à moi, dit Dantès : j'ai le bonheur d'être trop peu de chose pour que ma position m'en ait fait. Quant à mon caractère, un peu vif peut- être, j'ai toujours essayé de l'adoucir envers mes subordonnés. J'ai dix ou douze matelots sous mes ordres : qu'on les interroge, monsieur, et ils vous diront qu'ils m'aiment et me respectent, non pas comme un père, je suis trop jeune pour cela, mais comme un frère a?né.

- Mais, à défaut d'ennemis, peut-être avez-vous des jaloux : vous allez être nommé capitaine à dix-neuf ans, ce qui est un poste élevé dans votre état ; vous allez épouser une jolie femme qui vous aime, ce qui est un bonheur rare dans tous les états de la terre ; ces deux préférences du destin ont pu vous faire des envieux.

- Oui, vous avez raison. Vous devez mieux conna?tre les hommes que moi, et c'est possible ; mais si ces envieux devaient être parmi mes amis, je vous avoue que j'aime mieux ne pas les conna?tre pour ne point être forcé de les ha?r.

- Vous avez tort, monsieur. Il faut toujours, autant que possible, voir clair autour de soi ; et, en vérité, vous me paraissez un si digne jeune homme, que je vais m'écarter pour vous des règles ordinaires de la justice et vous aider à faire jaillir la lumière en vous communiquant la dénonciation qui vous amène devant moi : voici le papier accusateur ; reconnaissez-vous l'écriture ? ?

Et Villefort tira la lettre de sa poche et la présenta à Dantès. Dantès regarda et lut. Un nuage passa sur son front, et il dit :

? Non, monsieur, je ne connais pas cette écriture, elle est déguisée, et cependant elle est d'une forme assez franche. En tout cas, c'est une main habile qui l'a tracée. Je suis bien heureux, ajouta-t-il en regardant avec reconnaissance Villefort, d'avoir affaire à un homme tel que vous, car en effet mon envieux est un véritable ennemi. ?

Et à l'éclair qui passa dans les yeux du jeune homme en pronon?ant ces paroles, Villefort put distinguer tout ce qu'il y avait de violente énergie cachée sous cette première douceur.

? Et maintenant, voyons, dit le substitut, répondez-moi franchement, monsieur, non pas comme un prévenu à son juge, mais comme un homme dans une fausse position répond à un autre homme qui s'intéresse à lui : qu'y a-t-il de vrai dans cette accusation anonyme ? ?

Et Villefort jeta avec dégo?t sur le bureau la lettre que Dantès venait de lui rendre.

? Tout et rien, monsieur, et voici la vérité pure, sur mon honneur de marin, sur mon amour pour Mercédès, sur la vie de mon père.

- Parlez, monsieur ?, dit tout haut Villefort.

编辑推荐:

下载Word文档

温馨提示:因考试政策、内容不断变化与调整,长理培训网站提供的以上信息仅供参考,如有异议,请考生以权威部门公布的内容为准! (责任编辑:长理培训)

网络课程 新人注册送三重礼

已有 22658 名学员学习以下课程通过考试

网友评论(共0条评论)

请自觉遵守互联网相关政策法规,评论内容只代表网友观点!

最新评论

点击加载更多评论>>

精品课程

更多
10781人学习

免费试听更多

相关推荐
图书更多+
  • 电网书籍
  • 财会书籍
  • 其它工学书籍
拼团课程更多+
  • 电气拼团课程
  • 财会拼团课程
  • 其它工学拼团
热门排行

长理培训客户端 资讯,试题,视频一手掌握

去 App Store 免费下载 iOS 客户端